Brest sortilège
«Je ne figure point parmi les nostalgiques du Brest de Mac-Orlan, car ce n’est qu’en octobre 1951 que j’ai fait la connaissance de celle « dont il ne reste rien », et il y a des lustres que, longtemps rebelle à ses avances, je me suis dépouillé de trop tenaces préventions contre la ville renée de ses cendres.
Je sais donc gré à Caroline Didou d’avoir réussi à en capter les discrètes séductions, en choisissant comme centres d’intérêt, non seulement la mer, son éternelle compagne, mais aussi quelques-uns des témoins récents, emblématiques ou anonymes, de sa riche histoire.
La promenade à laquelle elle nous convie à travers ses compositions est tout sauf ennuyeuse. Le dessin est précis et très sûr, les formes qu’elle nous donne à voir ont une vraie présence, les couleurs chantent et même le béton sous son pinceau à des grâces de vieux granite.
Il est de bon ton dons certains cercles de dauber sur Brest « la revêche », voire « la sinistre ». Montrons-nous indulgent pour de telles foutes de goût : n’ai-je pas été moi-même un temps l’un de ces malheureux ? Le beau travail de Caroline Didou tord le cou à ces fables. « Brest la grise », peut-être, mais surtout « Brest la secrète », donc à découvrir et qui se mérite, « Brest sortilège » !
Encore merci à l’artiste d’avoir su si bien saisir le charme, l’âme aussi, d’une cité que l’on o crue trop vite ensevelie à jamais sous les tristes remblais de la reconstruction. »
[Jean-François Coatmeur – 8 février 2006 – Préface de Esquisse d’une ville : Brest par Caroline Didou]
Aux débuts des années 2010, Jacques Le Coz, a étudié trois parmi les romans de Jean-François Coatmeur dont l’action principale se déroule à Brest (Les sirènes de minuit – 1976, La nuit rouge – 1984, et La fille de Baal – 2005) pour voir comment la ville apparait dans les récits, en s’attachant d’abord aux lieux (noms de rues, etc.) puis aux personnages. L’étude a été publiée en 2014 dans un numéro hors-série des Cahiers de l’Iroise consacré aux « Scènes de crime à Brest » sous le titre « Le crime à Brest, c’est aussi… Jean-François Coatmeur ». L’article est illustré de superbes photos de Loïc Moyou.
[avec l’aimable autorisation de Dominique Derrien, Président de la la Société d’Étude de Brest et du Léon, éditrice des cahiers de l’Iroise]
Le crime à Brest c'est aussi... Jean-François CoatmeurJ’ai jeté l’ancre à Brest il y a quelque quarante-cinq ars, et j’en ai fait mon port d’attache. Quoi de surprenant dès lors, qu’il m’arrive souvent de tremper ma plume dans l’eau salée et que trois de mes ouvrages les plus marquants aient pour décor principal la couronne littorale de la cité du Ponant ? J’avoue même une faiblesse tenace pour son port de commerce, il ne me paraît pas ridicule de déceler, entre le fouillis gris de ses docks, de ses silos, de ses bassins sous la pluie et la complexité d’un tempérament que l’on dit tourmenté, une essentielle connivence. »
[Jean-François Coatmeur – Ancrage – Lettres du Ponant, mars 1999]
« Ma ville, c’est Brest ! » disait volontiers Jean-François Coatmeur dans la deuxième moitié de sa vie. Pourtant, à ses débuts brestois en 1952, la Cité du Ponant n’avait que peu d’attraits à ses yeux. Écoutons le nous conter comment elle sut trouver grâce à ses yeux (interview Oufipo – 2012) :
Le 28 avril 2018, un premier hommage lui est rendu dans Les Jardins de lecture des Capucins : six bancs portent désormais les noms de trois femmes et trois hommes auteurs engagés fortement liés à Brest : Nathalie Lemel, Anita Conti et Irène Frachon pour les femmes; Jean-François Coatmeur, Hervé Bellec et Christophe Miossec pour les hommes
(cliquez pour voir la photo agrandie)
Reconnaissante, la ville de Brest décida dès 2018 de donner à une voie de la cité du Ponant le nom de Jean-François Coatmeur. Le 25 janvier 2020, François Cuillandre, maire, inaugure la place Jean-François Coatmeur en plein cœur de la ville, au bas de la rue de Siam, place où se situe l’arbre empathique.
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